Il est vrai qu’en tant que pratiquants de karaté et donc pratiquants d’arts martiaux au sens général, l’ouverture est un point capital pour progresser. C’est dans cette démarche qu’Arnaud et moi même nous sommes déplacés à Lyon samedi 11 mars 2017 pour ouvrir notre vision sur la pratique du karaté. Notre volonté : « sortir de nos habitudes shotokaï » afin d’apprivoiser la différence et la confronter à nos connaissances respectives… Nous avons découvert au final deux styles très riches : le Wado ryu et le Yoseikan budo.
Je vous propose ci-après un petit compte rendu afin que ceux et celles qui n’ont pas pu y assister puissent tout de même avoir des pistes de réflexions pour progresser et puissent à terme enrichir leur pratique. En espérant ne pas trop dénaturer le propos de ces deux maîtres. Veuillez m’en excuser si tel était le cas. Bonne lecture.
14h10 à 14h30 : Echauffement général
L’échauffement est laissé à la main d’un expert fédéral entouré de tous les pratiquants (nombre de pratiquant amplement supérieur à une centaine). Le cardio monte vite, il fait par ailleurs particulièrement chaud dans le dojo. En peu de temps le corps est chaud et prêt à passer à la partie technique qui s’annonce intéressante…
14h30 à 15h : Intervention de Michel MULLER
Michel MULLER insiste sur l’importance du travail des fondamentaux et nous propose des enchainements relativement simples pour commencer : teisho uke suivi de haishu sur attaque kizami tsuki chudan ainsi que que kote gaeshi sur attaque kizami tsuki jodan suivi de mae geri chudan. Il insiste particulièrement sur le relâchement global du corps, surtout lorsqu’il donne mae geri : le coup part vite et « explose » juste à la fin du mouvement. Il insiste sur l’importance « d’éviter les contractions inutiles » lors de l’exécution d’un mouvement. Sur ce point on ne peut que le rejoindre vis à vis de notre pratique shotokaï.
15h à 15h30 : Intervention de Hiroo MOCHIZUKI
Maitre MOCHIZUKI insiste sur la notion de karaté « figé » et de karaté « moderne ». Pour lui les mouvements de karaté moderne doivent être amples, arrondis et naturels (ne surtout pas « robotiser » la pratique). Il commence donc par nous faire pratiquer une forme de age uke très généreuse seul, puis avec partenaire. Il nous fait comprendre que l’objectif de ce travail à deux est de générer le bien être mutuel, la santé : lorsque l’on amplifie les mouvements, les muscles s’étirent, le sang circule mieux et le corps travaille dans sa globalité. Chacun bénéficie ainsi du travail de l’autre. La dimension de partenaire prend alors tout son sens : rien n’est conflictuel, tout converge vers un même objectif. S’en suit alors un travail à deux de clé tout en relâchement au niveau du bras du partenaire. Personnellement je note l’importance de la respiration lors du travail de clé : elle doit être libre sous peine de provoquer des clés « contractées » complètement inefficaces. Ayant pratiqué avec un yoseikan budoka je note que lors d’un mouvement de clé, il est important d’appliquer une pression constante afin de ne laisser aucun échappatoire à tori.
15h30 à 16h : Intervention de Michel MULLER
A ce stade Michelle MULER poursuit sur des enchainement qui visent à faire provoquer l’attaque du partenaire. Selon lui, un bon pratiquant doit être capable d’amener son adversaire là où il le veut. Il insiste sur la dimension stratégique d’un assaut : il faut provoquer l’adversaire et ne pas attendre son attaque sous peine d’être en retard dans la réponse apportée. Plusieurs enchainements assez complexes et inhabituels pour notre style sont proposés pour appréhender le principe évoqué.
16h à 16h30 : Intervention de Hiroo MOCHIZUKI
Maitre Hiroo MOCHIZUKI poursuit sur le principe de distance entre partenaire : court, moyenne, longue et explique comment esquiver une attaque sur une distance relativement courte de manière souple et naturelle. Le « secret » : s’avancer sur le partenaire pour lui donner envie d’attaquer et s’effacer au dernier moment. Nous commençons de côté en hachiji dachi puis projetons notre corps sur tori qui attaque kizami tsuki jodan. Au moment ou le tsuki arrive, uke incline le buste légèrement vers l’avant et sort de l’axe d’attaque. S’en suit alors des enchainements libres à partir de ce travail d’esquive de base. A ce moment précis, Hiroo MOCHIZUKI insiste sur l’importance de ne pas se scléroser dans une forme et pour cela deux points sont évoqués :
– il faut cultiver sa personnalité d’une part pour se respecter soi même au regard de nos principes et désirs personnelles mais aussi cultiver sa personnalité pour se faire respecter en retour. Sans personnalité, l’être humain est « vide » et ses techniques ne peuvent qu’être « vides » également.
– Il faut créer, innover: se sentir libre d’exploiter son bagage technique. La créativité doit faire partie de l’état d’esprit du pratiquant. Ne jamais se figer dans une forme. Il faut sans cesse chercher à progresser et à aller plus loin dans sa pratique.
16h30 à 17h : Intervention de Michel MULLER
Dans cette partie du stage Michel MULLER passe à la vitesse supérieure : il poursuit les enchainements de base vus précédemment en rajoutant un gros travail de synchronisant mêlant clé, percussion avec les jambes, techniques de défense et contre attaque en même temps, saisie et déstructuration du partenaire pour l’amener au sol. Il insiste sur le fait qu’un technique est relative par rapport au corps : c’est le déplacement du centre qui provoque la clé sur l’enchainement démontré et non pas un simple mouvement de bras.
17h à 18h : Intervention de Hiroo MOCHIZUKI
Dans cette dernière partie du stage, Maitre MOCHIZUKI met l’accent sur un travail de chute : comment apprendre à chuter naturellement et surtout sans se blesser (approche réservée normalement aux enseignants mais évoquées lors de ce stage). Il fait alors une démonstration avec plusieurs pratiquants avec des gabarits complètement différents. Le ton est donné : faire chuter quelqu’un est accessible à tout le monde à condition de respecter certains principes biomécaniques : courbure de la colonne vertébrale lors de la chute, respect des cervicales, etc… S’en suit alors un travail souple de saisie sur mawashi geri avec amené au sol. Au préalable, Maitre Hiroo MOCHIZUKI explique qu’une forme de zenkutsu dachi trop basse n’est pas réaliste et nous en fait la démonstration. Il attaque le tibia d’un pratiquant de karaté figé en zenkutsu dachi qui ne parvient pas à esquiver et reçoit donc le coup sur le tibia. On retiendra donc qu’en kumite les postures doivent être bien plus relâchées que dans les formes kata afin d’assurer une disponibilité accrue du corps. Le stage se termine ensuite par un kihon assez intensif où l’objectif est d’apprendre à frapper plusieurs fois en kizami tuski et ura tsuki sur un pas en avançant et en reculant.
Le message de fin est alors donné par maître MOCHIZUKI : » Les stages sont importants pour s’unir. Vous êtes ma famille. Je vous remercie. »
Conclusion
Merci à ces deux maîtres d’exception pour leurs connaissances techniques, leur accessibilité, leur gentillesse, leur humour ainsi qu’à leur esprit ouvert et avant tout humain.