Réflexion martiale n°2 : sports de combat et arts martiaux, même combat ? Quid du Shotokai ?

Bonjour à tous,

je vous propose aujourd’hui une nouvelle réflexion martiale qui mérite à mon avis de s’arrêter quelques instants, car en effet, elle prête souvent à confusion. Les apparences peuvent être trompeuses… Je vais volontairement caricaturer les choses pour tenter de vous aider à comprendre la différence entre sports de combat et arts martiaux. Je vous propose ici une brève synthèse concernant ces deux formes de pratique.

Sur la base de mon expérience personnelle, je résumerai les choses ainsi :

  • Quand l’une cherche la victoire sur l’adversaire, l’autre cherche la victoire avec le partenaire,
  • Quand l’une privilégie le spectacle, l’autre privilégie l’action discrète,
  • Quand l’une se soucie du plus fort, l’autre veille à renforcer le plus faible,
  • Quand l’une prépare le champion de demain, l’autre construit l’Homme du présent,
  • Quand l’une cherche à récolter les médailles, l’autre cherche à cultiver les fruits de la sagesse,
  • Quand l’une se stoppe à un certain âge, l’autre se poursuit jusqu’à un âge certain,
  • Quand l’une impose des règles compétitives, l’autre enseigne des règles universelles.

La première est sportive, la deuxième est martiale.

En réalité si sports de combat et arts martiaux travaillent tous deux sur le corps et l’esprit, ils sont pourtant bien différents dans le fond. Pour moi, ces deux formes de pratique sont comme l’océan : si l’on survole du regard ce dernier, on perçoit seulement l’eau jusqu’à l’infini . En revanche  si l’on dépasse les simples apparences alors on peut voir dans l’océan plus qu’une simple étendue d’eau. On distinguera alors d’une part la surface visible et agitée des houles (le sport de combat) et d’autre part le fond invisible et calme empli de mystères (les arts martiaux). Deux versants différents d’un même océan… Il ne faut donc pas se limiter aux apparences. Il conviendra donc désormais de bien distinguer karaté “sportif” et karaté “martial” même si l’ensemble est regroupé sous l’appellation unique de “karaté”.

Mais alors qu’est ce qui est mieux en terme de pratique : sport de combat ou arts martiaux ? En réalité, cette question n’a strictement aucun sens dès lors où ces pratiques ne visent pas les mêmes objectifs et ne s’adressent donc pas aux même personnes, aux mêmes besoins. Il appartient seulement au pratiquant de savoir ce qui lui correspond le mieux pour son besoin d’épanouissement personnel. En revanche, soyez sûr d’une chose : à travers ces deux formes de pratique, si les objectifs sont différents, le travail technique l’est aussi.

Pour l’heure, le karaté do shotokaï est donc bien un art martial et non un sport de combat. Aucune compétition n’est préconisée dans ce style de karaté (bien qu’elle ne soit pas formellement proscrite pour autant). En shotokaï le seul adversaire : c’est nous même. Sa pratique est avant tout conçue pour développer une utilisation fine du corps par l’esprit et espérer longévité au pratiquant. D’ailleurs cette philosophie martiale n’est pas spécifique au shotokaï. Je dirai même qu’elle est l’essence des arts martiaux en général. Elle puise en réalité ses sources directement de Chine via le kung-fu Shaolin, qui avait pour objectif premier de tonifier les moines du temple par la mise en application de formes précises. Pratiquer un art martial c’est donc chercher la connaissance subtile du corps alliée à la puissance de l’esprit.

Enfin je terminerai par une petite digression mais qui à mon sens s’impose dans cet article. L’usage de gants de protection lors d’entrainement martiaux a parfois une connotation sportive auprès de certains puristes qui associent l’image du gant à la pratique d’un karaté sportif. Personnellement je ne partage pas cette vision. Pour moi, l’usage de gants ne caractérise en rien le fait que la pratique soit sportive ou martiale. Ce n’est pas cela qui détermine si l’on pratique un sport de combat ou un art martial. Les gants ne sont qu’un moyen permettant d’aborder des objectifs qui peuvent être : ou sportifs, ou martiaux. Ne confondons donc pas moyens et objectifs. Ainsi gants et shotokai sont deux termes, qui à mon sens, restent parfaitement compatibles. Il faut juste bien savoir ce que signifie pratiquer un sport de combat et pratiquer un art martial et ne pas perdre de vue ce que l’on étudie.

Amis budoka, j’espère que ma vision des choses vous parle et qu’elle fait écho à votre vision actuelle. Si tel n’était pas le cas, ce n’est pas grave car l’objectif de ces réflexions est avant tout de mettre à plat des sujets martiaux variés, qui n’ont qu’une seule prétention : le plaisir de partager.

Rendez-vous pour une prochaine réflexion martiale ^^

A bientôt.